Qu’est-ce qu’un virus ?

Par Manon Delaplace. École Nationale de Vétérinaire d’Alfort

Un virus est un parasite microscopique (taille dans l’ordre de 30 à 600 µm). Contrairement aux bactéries et autres parasites, ils ne peuvent pas se multiplier sans infecter un être vivant appelé hôte, chez lequel ils pénètrent. Les virus sont donc des parasites intracellulaires obligatoires. Ils vont exploiter les mécanismes de la cellule infectée pour produire les « briques » (génome, protéines) qui les composent. Ainsi une cellule infectée se transforme en une usine à produire des virus.

Il existe des virus chez tous les êtres vivants : les animaux (y compris les insectes), les plantes et mêmes les microorganismes comme les bactéries. À l’intérieur d’un même hôte, les virus ne se multiplient pas partout, mais, les cellules étant spécialisées,  les virus infectent certaines d’entre elles (une propriété appelée tropisme). Cela détermine les manifestations pathologiques : par exemple le VIH infecte et se multiplie dans les cellules du système immunitaire, le virus de la grippe dans les cellules du système respiratoire). Dans la plupart des cas les infections virales sont asymptomatiques, c’est-à-dire qu’elles ne causent pas de maladie chez l’hôte.

Les virus sont les « objets » biologiques les plus abondants sur Terre, et les océans l’endroit où l’on trouve la plus grande quantité de virus (principalement des bactériophages = virus infectant les bactéries). On estime qu’il y en a 106 par ml. Ces virusexercent un rôle majeur dans le maintien de l’équilibre de la biosphère (par exemple en participant au cycle du carbone).

Les virus sont composés au minimum d’un génome (l’ensemble des gènes du virus) et d’une structure formée de protéines virales appelée capside qui encapsule le génome et le protège. Dans la majorité des cas, la capside a une forme icosaédrique (= ballon de football, pour les herpesvirus par exemple, tel le virus de la varicelle) ou hélicoïdale (virus filamenteux comme le virus Ebola). Certains virus possèdent en plus une enveloppe lipidique formée des membranes de la cellule à partir de laquelle ils ont été produits. Ces virus sont appelés virus enveloppés, tandis que les virus sans enveloppe sont appelés virus nus.

En dehors d’un hôte, les virus enveloppés sont plus fragiles que les virus nus. En effet l’enveloppe peut être facilement détruite (par exemple en se lavant les mains avec du savon) réduisant ainsi le pouvoir infectieux du virus.

Le génome des virus peut être soit sous forme d’ADN, soit sous forme d’ARN. Dans les deux cas, le génome peut être composé d’un brin simple, ou d’un double brin, être linéaire ou circulaire. Les ARN simples brins peuvent être de sens positif (comme les ARNs messagers des cellules) ou de sens négatif. Le génome de certains virus est segmenté, c’est-à-dire qu’il est présent sous forme de plusieurs brins différents dans la particule virale.

Les Coronavirus

Les Coronavirus sont des virus enveloppés à ARN simple brin positif. Ils possèdent le plus grand génome parmi tous les virus à ARN connus. Ils comportent une enzyme spécifique qui est responsable de corriger une partie des mutations (erreurs) qui apparaissent lors de la copie du génome. Ainsi ces virus sont plutôt stables d’un point de vue génétique.

Leur nom provient des protéines virales appelées spicules qui sont enchâssées dans l’enveloppe du virus et semblent former une couronne (ou corona en latin) autour du virus. Les spicules jouent un rôle clé dans la reconnaissance de la cellule hôte dans laquelle le virus pourra se multiplier. En effet, en se liant à une (ou plusieurs) protéine(s) exposée(s) à la surface cellulaire appelée(s) récepteur (et co-récepteur), par un mécanisme type « clé-serrure », les spicules permettent la pénétration du virus dans sa cellule hôte.  Le virus SARS-CoV-2 utilise comme récepteur la molécule ACE-2 (une enzyme située sur la membrane, mise en jeu dans la modification de l’angiotensine, une molécule jouant un rôle clef dans le contrôle de la pression artérielle). Cette étape peut être ciblée par des médicaments visant à inhiber l’infection virale.

Les Coronavirus infectent un large panel d’animaux, ce qui peut avoir de lourdes conséquences pour les élevages. Cela a conduit à les étudier depuis la moitié du 20ème siècle. Ils sont très souvent des virus respiratoires ou entériques (c’est-à-dire qu’ils infectent et se multiplient dans le système respiratoire ou digestif). On connait pour l’instant 7 Coronavirus qui infectent les humains. Quatre parmi eux ont été isolés depuis une cinquantaine d’années, et sont endémiques (présents naturellement) dans la population humaine. Ils sont responsables d’infections respiratoires légères qui guérissent spontanément (environs 15 à 30 % des infections respiratoires chaque année). HCoV-229E est par exemple de virus pouvant être responsable d’un rhume.

Deux autres coronavirus, SARS-CoV et MERS-CoV, sont apparus depuis les années 2000 en Asie (2002-2003) et Moyen Orient (2012). Comme le virus SARS-CoV-2, qui est responsable de l’épidémie actuelle de la maladie Covid-19, ces virus se répliquent (c.-à-d. se multiplient) dans le système respiratoire et se retrouvent donc dans la salive et dans le nez. Ils provoquent des maladies respiratoires sévères, pouvant être fatales pour les personnes infectées.

03/06/20 : correction concernant la forme des capsides des virus donnés en exemple.

Sources

Vabret, A., Dina, J., Brison, E., Brouard, J., Freymuth, F., 2009. Coronavirus humains (HCoV). Pathologie Biologie 57, 149–160. https://doi.org/10.1016/j.patbio.2008.02.018

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