Broncho-pneumopathie chronique obstructive et Sars-Cov-2

Par Danushki Herath et Maylis Dagouassat

Le virus Sars-CoV-2 apparu en Chine, en décembre 2019 provoque une maladie à coronavirus appelée COVID-19. En mars 2020, l’épidémie est déclarée pandémie par l’organisation mondiale de la santé (OMS) car plus d’une centaine de pays dans le monde sont concernés. La maladie touche majoritairement les personnes âgées et celles fragilisées par d’autres maladies comme le diabète, les problèmes cardiaques, les maladies pulmonaires comme l’asthme ou encore la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO).

1.    Qu’est-ce-que la BPCO ?

La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie pulmonaire qui entraîne une incapacité des poumons à fournir du dioxygène aux différents organes. C’est une maladie peu connue du grand public, car elle avance silencieusement. En effet, les symptômes étant peu spécifiques, les patients consultent très tardivement. Cependant, l’OMS considère que la BPCO deviendra la 3ème cause de mortalité dans le monde d’ici 2030. Elle touche plus particulièrement les fumeurs. Cependant, des personnes travaillant dans le bâtiment, la sidérurgie et le textile qui sont exposées aux poussières de silice, de ciment, de fer, d’acier et/ou de coton peuvent également la développer. Enfin, l’exposition à la pollution peut la déclencher et l’aggraver. Cette maladie fait chaque année plusieurs millions de morts, et à ce jour il n’existe aucun traitement qui permette d’en guérir.

Figure 1 : Comparaison entre un poumon sain et celui d’un patient atteint de BPCO

Chez les patients atteints de BPCO, l’agression répétée des poumons, par exemple par la fumée de cigarette qui contient des substances nocives, entraine une irritation et une inflammation des voies aériennes. Ceci provoque un épaississement des parois des bronches ainsi qu’une hypersécrétion de mucus, ce qui rend le passage de l’air plus difficile.

 À ceci vient s’ajouter, une destruction des parois qui séparent les alvéoles (emphysème) ce qui diminue les échanges gazeux (Figure 1).

Figure 2 : Rôle des alvéoles. Illustration issue d’Avessa Roston et traduit par Richard Ying (KezaCovid19 (@Kezacovid)                                                                                                

Les alvéoles sont des petits sacs situés à l’extrémité des bronchioles, elles ont une paroi très fine et sont entourées de vaisseaux sanguins ce qui permet les échanges gazeux. En effet, le dioxygène se trouvant dans l’air inspiré diffuse dans le sang au niveau de ces alvéoles et le dioxyde de carbone présent dans le sang, diffusant en sens inverse, va circuler vers les alvéoles et être rejeté avec l’air expiré (Figure 2).

Chez un patient BPCO, les échanges gazeux sont diminués. En effet, le dioxygène arrive difficilement au niveau des alvéoles lors de la phase d’inspiration et ces alvéoles accumulent le dioxyde de carbone qui est plus difficilement éliminé lors de la phase d’expiration. L’ensemble conduit à une diminution de l’oxygénation des organes. Les principaux symptômes sont une toux persistante, des expectorations (crachats) dès le matin, un essoufflement (dyspnée) et des sifflements respiratoires. Ces symptômes apparaissent progressivement et s’aggravent au cours du temps. Certaines activités quotidiennes deviennent de plus en plus difficiles à réaliser et l’activité physique diminue. En fonction de l’avancée de la maladie, 4 stades ont été définis et des traitements ont été associés à chacun d’eux (Figure 3).

Figure 3 : Les stades de la BPCO et les traitements associés

2.    Pourquoi fumer ou avoir une BPCO est-il un facteur de risque d’aggravation du COVID-19 ?

Figure 4 : Reconnaissance entre le coronavirus et un pneumocyte II. Illustration issue de Sui huang medium 2020

Le coronavirus entre dans l’organisme par le nez, la bouche ou les yeux et va atteindre ensuite les alvéoles pulmonaires. Il va cibler des cellules des alvéoles appelées pneumocytes II. Les pneumocytes II présentent à leur surface un récepteur nommé ACE2. Le virus, grâce aux spicules dont il est recouvert, va pouvoir se fixer sur ACE2, rentrer dans la cellule et de se multiplier (Figure 4).

L’entrée du virus dans les pneumocytes II va déclencher une réaction inflammatoire très importante qui va conduire à l’apparition d’un syndrome de détresse respiratoire qui est le stade le plus grave de la maladie.  

Alors pourquoi les fumeurs ou les patients BPCO seraient-il plus ou moins sensibles à ce virus ?

À ce jour, peu d’informations sont disponibles. Néanmoins, chez les fumeurs, le récepteur ACE2 est plus présent dans les voies respiratoires que dans celles de patients non-fumeurs, ce qui les rendrait plus sensibles à l’infection par le SARS-CoV-2. Néanmoins, il semble que les fumeurs soient protégés et contractent moins le coronavirus. Une explication avancée serait un effet protecteur de la nicotine. En revanche, cet effet semble ne plus exister une fois le virus installé dans les alvéoles. Les fumeurs développent alors plus rapidement le syndrome de détresse respiratoire aigüe.

Chez les patients BPCO, en revanche, les résultats sont plus controversés. En effet, le récepteur ACE2 est exprimé de façon plus importante chez ces patients que chez les fumeurs ce qui les rendraient là encore plus sensibles à l’infection au SARS-CoV-2. De plus, une protéine particulière, le plasminogène, a été identifiée chez les patients atteints de BPCO, et modifierait le virus le rendant plus virulent.

Cependant de façon surprenante, les patients atteints de BPCO de stades 1 et 2 et présentant un syndrome de détresse respiratoire étaient peu représentés dans les premières études effectuées en Asie. Ce taux était d’ailleurs plus faible que pour des patients atteints d’autres maladies (diabète ou des maladies cardiovasculaires). Une explication possible à ce phénomène serait la prise de médicaments (notamment corticoïdes) qui diminuerait la présence d’ACE2, et donc l’entrée du virus. Beaucoup de questions restent donc sans réponse actuellement. Ainsi, d’autres études menées dans les pays touchés par le COVID 19 devront être réalisées afin de confirmer cette hypothèse. 

Pour aller plus loin